Article 210
Mis à jour le 18.09.2024
2
1
4
0

Art. 210 Proposition de décision

1 L’autorité de conciliation peut soumettre aux parties une proposition de décision:

a. dans les litiges relevant de la loi du 24 mars 1995 sur l’égalité;
b. dans les litiges relatifs aux baux à loyer ou à ferme d’habitations ou de locaux commerciaux et aux baux à ferme agricoles en ce qui concerne la consignation du loyer ou du fermage, la protection contre les loyers ou les fermages abusifs, la protection contre les congés ou la prolongation du bail à loyer ou à ferme;
c. dans les autres litiges patrimoniaux dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 10 000 francs.

2 La proposition de décision peut contenir une brève motivation; au surplus, l’art. 238 est applicable par analogie.

La version antérieure au 01.01.2025

Art. 210 Proposition de jugement

1 L’autorité de conciliation peut soumettre aux parties une proposition de jugement:

a. dans les litiges relevant de la loi du 24 mars 1995 sur l’égalité;
b. dans les litiges relatifs aux baux à loyer ou à ferme d’habitations ou de locaux commerciaux et aux baux à ferme agricoles en ce qui concerne la consignation du loyer ou du fermage, la protection contre les loyers ou les fermages abusifs, la protection contre les congés ou la prolongation du bail à loyer ou à ferme;
c. dans les autres litiges patrimoniaux dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 5000 francs.

2 La proposition de jugement peut contenir une brève motivation; au surplus, l’art. 238 est applicable par analogie.

Message
p. 6941 s.

Proposition de jugement

La proposition de jugement occupe une place intermédiaire entre une proposition de règlement à l’amiable et une décision. Elle s’assimile à une proposition de règlement à l’amiable dans la mesure où chaque partie peut la refuser librement. En cas de silence des parties en revanche, elle vaut décision entrée en force et exécutoire.

Certains cantons connaissent déjà cette institution pour les litiges patrimoniaux de faible montant. Ainsi les juges de paix des cantons de SZ et AG peuvent soumettre une proposition de jugement lorsque la valeur litigieuse est inférieure à 2000 francs; dans le canton de SG, cette compétence va même jusqu’à 5000 francs. Cette notion n’est pas non plus étrangère au droit fédéral: dans certains litiges du droit du bail à loyer et à ferme, les autorités de conciliation peuvent rendre une décision qui, en réalité, n’est qu’une proposition de jugement (consignation des loyers ou fermages, contestation du congé, prolongation du bail ou du bail à ferme : art. 259i, 273, 274e, al. 2, et art. 274f, al. 1 [a]CO).

La proposition de jugement a été contestée lors de la procédure de consultation. Le Conseil fédéral tient cependant fermement à cette institution car elle peut constituer un instrument complémentaire permettant de résoudre les litiges avant d’entamer une procédure. Contrairement à l’avant-projet (art. 204 AP), elle est toutefois conçue comme une option, à la libre disposition de l’autorité de conciliation. Elle est envisagée notamment pour les cas où – malgré la prédisposition des parties à transiger – un accord ne peut être trouvé.

Toute cause civile ne peut toutefois aboutir à une proposition de jugement, car l’activité principale de l’autorité de conciliation doit rester celle de la conciliation classique (art. 210 al. 1) :

- elle n’est admise sans restriction que dans le domaine du droit de l’égalité (let. a), ce qui correspond à un besoin pratique de ces offices de conciliation spécialisés.

- comme auparavant, elle n’est en revanche admise en matière de droit du bail à loyer et à ferme que dans certains cas (let. b). La proposition de l’avant- projet, qui allait plus loin, a été refusée en procédure de consultation.

- enfin, la proposition de jugement est possible dans les litiges patrimoniaux dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 5000 francs (let. c).

La proposition de jugement doit être rédigée et communiquée comme un jugement (art. 210 al. 2). Elle n’a pas besoin d’être motivée, même si les parties devaient en faire la demande, car un recours n’est pas requis pour s’y opposer. [cf. art. 211]

applicable (aussi) sous le CPCrév2020 p. 2632 s., p. 2625 et p. 2665 s.

p. 2632 s: Remplacement d’une expression - Le code de procédure civile emploie systématiquement le terme «décision», indépendamment des multiples désignations cantonales (voir également le Message 2006, 6951). Dans ce contexte, l’expression «proposition de jugement» dans le domaine de la procédure de conciliation est peu cohérente (à ce propos, voir également Bruno Lötscher-Steiger, Prüfungs- und Entscheidbefugnisse der Schlichtungsbehörde, in Fankhauser/Widmer Lüchinger/Klinsler/Seiler (éd.), Festschrift Sutter-Somm, Zurich 2016, p. 409 ss., 414, qui préférerait cependant le terme «Erledigungsvorschlag» (proposition de règlement), ce qui mettrait en évidence la distinction entre ce type de prononcé et la décision). Elle sera donc remplacée par le terme «proposition de décision», qui apparaît plus logique. Cette modification entraîne une reformulation des art. 202, al. 4, 203, al. 2, 205, al. 2, du titre précédant l’art. 210, du titre et du texte de l’art. 210 (al. 1 et 2) ainsi que de l’art. 211, al. 1, 3 et 4. Ces modifications sont de nature purement terminologique. L’utilisation du terme «jugement» dans d’autres articles (comme aux art. 54, al. 1, art. 407b, al. 2 et art. 407c, al. 2, CPC) n’est pas touchée.

p. 2625: Depuis l’entrée en vigueur du CPC, la procédure de conciliation a fait ses preuves en tant que méthode rapide, efficace et économique de règlement des litiges. Le renforcement des solutions précontentieuses et extrajudiciaires était un objectif central lors de l’élaboration du CPC et les résultats de cette procédure sont aujourd’hui très positifs puisqu’elle permet de régler 50 à 80 % des litiges (rapport explicatif relatif à l’avant-projet, p. 10 ss). Le canton de Berne a déposé une initiative demandant le développement de la procédure et des audiences de conciliation, notamment à travers une compétence plus étendue des autorités de conciliation (initiative cantonale bernoise 16.302 «Pour le développement du modèle des audiences de conciliation»). Comme demandé par une large majorité des participants à la consultation (Synthèse des résultats de la consultation, ch. 4.5) – certains souhaitant des mesures plus importantes – plusieurs aspects de la procédure de conciliation sont effectivement développés dans le projet:

- La compétence de l’autorité de conciliation pour soumettre aux parties une proposition de jugement est étendue aux autres litiges patrimoniaux au sens de l’art. 210, al. 1, let. c, P-CPC dont la valeur litigieuse maximale est inférieure à 10 000 francs (au lieu de 5000 francs actuellement). Malgré certaines demandes formulées lors de la consultation, la règle selon laquelle l’autorité de conciliation peut statuer au fond dans les litiges patrimoniaux d’une valeur litigieuse inférieure ou égale à 2000 francs restera inchangée.   

  • - (...)

p. 2665 s.: Art. 210, al. 1, phrase introductive et let. c - Dans certains cas, en plus de sa fonction générale d’instance de conciliation et de son pouvoir de décision dans le cadre de sa fonction juridictionnelle limitée (art. 212 CPC), l’autorité de conciliation peut soumettre aux parties une proposition de jugement (art. 210 CPC; pour la proposition de modification terminologique prévoyant le remplacement de «proposition de jugement» par «proposition de décision», voir supra sous remplacement d’une expression [p. 2632 s.]). La proposition de jugement déploie les effets d’une décision entrée en force si aucune des parties ne s’y oppose dans un délai de 20 jours à compter du jour de sa notification écrite (art. 211, al. 1, CPC).

Nouvel instrument introduit à l’échelle suisse par le CPC, la proposition de jugement peut constituer une solution simple et rapide de résolution des litiges. D’une part, elle peut permettre de mettre un terme à des procédures dans lesquelles une transaction a échoué de peu et où le pouvoir de l’autorité de conciliation de proposer un jugement peut être ressenti comme un soulagement par les parties, notamment par celles craignant de perdre la face. D’autre part, ce moyen peut permettre de régler efficacement la question du défaut, notamment lorsque le défendeur ne se rend pas à l’audience pour des raisons financières. Les enquêtes ont montré qu’en 2012, au niveau national, 3 % de toutes les procédures de conciliation initiées ont pu aboutir suite à une proposition de jugement. Dans deux cantons qui connaissaient déjà cet instrument, ce taux était considérablement plus élevé (8,5 % en Argovie en 2011; 6,2 % à Saint-Gall; voir Isaak Meier/Sarah Scheiwiller, Erfolg des Schlichtungs- und Urteilsvorschlagsverfahrens nach neuer ZPO, RDS 2014 I, p. 155 ss, 186 s.).

Le Conseil fédéral est d’avis que l’efficacité de la procédure de conciliation peut encore être améliorée en étendant les compétences de l’autorité de conciliation en matière de proposition de jugement. Il propose donc d’adapter l’art. 210, al. 1, let. c, CPC afin de permettre à l’autorité de conciliation de soumettre une proposition de jugement dans les litiges patrimoniaux dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 10 000 francs (au lieu de 5000 francs seulement aujourd’hui). Une large majorité a soutenu cette proposition lors de la consultation, certains acteurs ayant même demandé qu’aucune valeur litigieuse maximale ne soit fixée pour les propositions de jugement, alors que d’autres participants ont souhaité que le droit en vigueur ne soit pas modifié (Synthèse des résultats de la consultation, ch. 5.33). Le Conseil fédéral suggère un montant plus élevé encore que celui prévu par l’initiative bernoise évoquée, qui demandait le relèvement de la limite à 8000 francs (voir 16.302 initiative du canton de Berne «Pour le développement du modèle des audiences de conciliation»). En revanche, il considère qu’il n’est pas judicieux de laisser aux cantons la liberté d’augmenter ou non la limite de la compétence de l’autorité de conciliation, dans la mesure où cela irait à l’encontre de l’effort général d’unification de la procédure civile. Il refuse en revanche d’augmenter la valeur litigieuse déterminant la compétence de décision des autorités de conciliation (art. 212, al. 1, CPC), comme le demandent certains acteurs, parce que ce relèvement serait particulièrement délicat pour le système des juges de paix. Par ailleurs, notamment lorsque les parties ne sont pas représentées, elles devront être informées dans tous les cas des effets de la proposition de jugement et en particulier du fait que son acceptation constitue une renonciation aux moyens procéduraux plus étendus de la procédure simplifiée.